Cenon : La Zone Libre évacuée et déjà disparue


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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 11/02/2021 PAR Yoan Denéchau et Solène Méric

C’est en novembre 2019, que les premiers habitants de « la Zone Libre » ont investi les appartements de l’ancienne résidence pour personnes âgées Paul-Ramadier qui jouxte la zone commerciale de La Morlette à Cenon. Ce sont 80 familles, pour la majorité en situation régulière sur le territoire français, qui y ont trouvé refuge : étrangers malades, demandeurs d’asile, salariés et étrangers autorisés à résider en France, listent les associations qui les accompagnent. Et avec eux une centaine d’enfants dont environ 80 seraient scolarisés de l’école primaire au lycée. Du côté de l’Etat, les chiffres sont moindres, puisque ce sont 120 personnes qui ont été évacuées ce 11 février du 125, rue Pelletan à Cenon. Masques, gel hydroalcoolique et paniers repas leur ont été distribués, précise-t-on du côté de la préfecture.

 

« Ce n’était pas nécessaire ! »
Après deux premières alertes en juin et octobre derniers, l’évacuation de ce matin a été menée, selon la Préfecture, en application de l’ordonnance de janvier 2020 qui casse la trêve hivernale « au vu de l’urgence de la situation » et notamment « des risques en termes de sécurité et de santé ». Les lieux étant encerclés par les camions de police, l’évacuation s’est globalement déroulée dans le calme, même si des militants associatifs présents pour l’occasion ont essuyé quelques gazages au lacrymogène afin de leur empêcher l’accès au lieu.

Des militants qui, tout comme un certain nombre de représentants politiques (EELV, PCF et LI notamment), sont vent debout contre cette opération d’évacuation. « C’est d’une violence terrible. Ca intervient en plein milieu d’année scolaire, pendant l’hiver. Les gamins qui sont partis vont devoir interrompre leur scolarité. Les conditions dans lesquelles ça se fait sont particulièrement indignes. Ce n’était pas nécessaire ! », estime Bernard Broustet, délégué régional de Médecin du Monde présent ce mercredi à l’Athénée Municipal de Bordeaux, ouvert en urgence par la Ville pour accueillir les personnes sans solution d’hébergement.
Joint par téléphone dans le cadre d’une émission de radio sur le logement, réalisée en partenariat par Aqui.fr, O2Radio et l’Écho des Collines, Pascal Paoli, de la Fondation Abbé Pierre, a réagi à cette évacuation. « Si les habitants de la Zone Libre en ont été réduits à cette situation, c’est qu’ils n’avaient pas d’autres solutions. L’expulsion démontre la faillite de l’État quand aux dispositifs d’urgence sociale, dont le 115 », a lancé le directeur régional de la FAP.

Car si une partie des habitants ont accepté les propositions d’hébergement faites par l’Etat, 58 selon la Préfecture, un certain nombre restent sans solution ou ont refusé ces propositions de mise à l’abri parfois lointaines. Leur accueil « pour la journée », précise la mairie de Bordeaux, vise à prendre en charge ces hommes, femmes et enfants, arrivés sur le parvis de la cathédrale dans la matinée. L’objectif étant de parvenir à trouver des solutions « acceptables » avant le couvre-feu de 18h.

Des conditions météo et sanitaires « favorables » à l’évacuation

Les associations en lien avec la Zone Libre s’interrogent sur la temporalité de cette expulsion (trêve hivernale prolongée jusqu’à août) et le contexte épidémique. Delphine Balsa, directrice de cabinet de la Préfecture de Région a jugé ce jeudi matin devant la Zone Libre que « c’était le moment adéquat » pour procéder à l’expulsion. « Il ne fait pas froid ce matin et les indicateurs de la Covid-19 en Gironde et en Nouvelle-Aquitaine sont en baisse […] », a-t-elle argumenté. Des propos qui ont fait bondir le directeur régional de la Fondation Abbé Pierre. « Il n’y avait aucune raison juridique, économique et sociale valable pour expulser ces gens, peu importe qu’il fasse beau ou pas », s’ulcère Pascal Paoli.

Libérée de ces occupants, et de leurs biens, l’ancienne résidence pour personnes âgées a été rendue à son propriétaire, SA Logévie. Dès la fin de matinée, cordon policier de sécurité toujours en place, les tractopelles étaient déjà à l’oeuvre pour la destruction du site. Une manière radicale d’empêcher toute nouvelle intrusion. Et de faire place nette au promoteur Pichet en charge d’une large restructuration du centre commercial de la Morlette tout proche… Circulez, il n’y a (plus) rien à voir au 125 rue Pelletan.

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