Grand Entretien: Philipe Raoux, depuis la Winery, part à la conquête de la Chine.


La Winery
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 08/05/2011 PAR Joël AUBERT

« Le marché chinois, c’est simple, est sans fond ! Il est à une échelle que nous avons du mal à imaginer. Et plus il y aura de Chinois à Bordeaux moins il y aura de fraudes en Chine; il faut les faire participer à notre viticulture.  » Philipe Raoux regarde résolument vers ce nouveau marché, ces nouveaux consommateurs, conscient qu’au delà des affaires à réussir la meilleure façon de se défendre c’est l’attaque. J’avais mis en vente cette propriété à Lalande de Pomerol : 21 hectares en AOC; c’était une taille qui convenait bien à Cofco pour leur première approche du marché bordelais. Les tractations ont duré plus de trois ans ; la grosse difficulté consistait à synchroniser les temps français et chinois. » Savoir attendre en quelque sorte. «Il faut dire, ajoute Philippe Raoux, que je nourrissais une idée de collaboration et l’ambition de distribuer du même coup, les vins d’Arsac en Chine. » L’un de ses deux fils, Pierre, est devenu l’ambassadeur d’Arsac là-bas, une année passée entre Pékin et Shangaï décisive pour installer le vin sur le marché chinois. Le propriétaire de la Winery s’envole d’ailleurs ce 10 mai pour la Chine le retrouver, faire le point sur place et prendre la mesure des développements attendus.

Créateurs de marques
Cofco, troisième opérateur pour le vin en Chine est un groupe d’Etat ; Philippe Raoux dispose d’une petite équipe de quatre personnes quidésormais se consacrent à l’approche des entreprises privéesavec lesquelles on peut traiter des volumes importants. « Nous créons des marques avec eux, avons notamment une très belle idée avec un particulier ; les Chinois venus chez nous ont découvert le « signe œnologique » et veulent créer des « Maisons de la Culture du vin ». Ce sont le plus souvent des hommes d’affaires qui ont fait fortune dans l’immobilier, sont richissimes, ont une masse d’argent entre les mains et veulent conquérir le monde. » Pour eux une bouteille de vin de Bordeaux véhicule bien plus que du vin de Bordeaux souligne Philipe Raoux ; « c’est la culture et tout de suite ils veulent accéder à ce qui, socialement, est le plus identifiant ».

Oenotourisme : de nouveaux développements
Comprenons que le créateur de la Winery qui est un homme de culture, passionné d’art contemporain, saura mieux que beaucoup d’autres accompagner les aspirations de ces représentants d’une civilisation millénaire.Pour autant, l’homme d’affaires ne cède rien de son projet initial, de sa volonté de faire de la Winery le phare de l’oenotourisme régional. » Nous avons passé le cap des 50.000 visiteurs l’an dernier, nous sommes le premier site oenotouristique d’Aquitaine, mais Margaux, aussi prestigieux soit-il, n’est pas la Napa Valley et Bordeaux n’est pas San Francisco. Unecomparaison juste forcée, pour souligner qu’en effet « ça aura pris plus de temps que je ne pensais », avec ce simple constat qui renvoie au vieux fond de scepticisme du milieu viticole bordelais : « je pensais, malgré tout, qu’ily aurait une curiosité locale ; je ne l’ai pas rencontrée, ce fût presque l’inverse… ». N’en demeure pas moins que, non seulement, les habitués reviennent mais que l’objectif de remplissage de la Winery – 100 000 personnes -sans doute un peu surestimé au départ, reste du domaine du possible quand on considère le nombre d’événements, de séminaires, de sessions de formations ou deprésentations de produits qui s’y succèdent.D’ailleurs, une nouvelle étape du développement du lieu va s’engager avec la création d’une résidence hôtelière quatre étoiles sur une parcelle decinq hectares cédées par la Winery à un investisseur qui va compléter l’offre de celle-ci: il viendra en appui de nos activités – la restauration en particulier- note Philippe Raoux et nous des siennes. Nous allons nous adresser à une clientèle du nord de l’Europe, une clientèle de « Resort Œnologique », et nous inscrire dans un Tour oùseront organisés des circuitsautour de trois sites:un en Languedoc, un en Bourgogne et la Winery en bordelais. En une semaine les visiteurs étrangers auront découvert une partie essentielle de la viticulture française ». Et, bien entendu, auront eu l’occasion de s’initier à la dégustation en apprenant à quel « signe œnologique » ilsappartiennent. Une innovation qui marche puisque 20.000 personnes s’y sont exercéesdepuis 2007 et que selon le maître des lieux « aucune n’est jamais revenue une bouteille en main » dans laquelle elle ne se serait pas reconnue …Le conceptest alléchant il est « franchisé dans les hôtels, à l’étranger, en Chine en particulier mais selon son inventeur «n’a pas encore trouvé son modèle économique.» Il participe, en tout cas, à l’éducation du consommateur et à la promotion du vin et des vins car la Winery est, à cet égard, un carrefour passionnant à fréquenter. Philippe Raoux reste fidèle au meilleur d’une saga familiale qui a débuté  avec un arrière grand père négociant en 1880 en Algérie et a connu son apogée avec la création par son père de la vente par correspondance sous l’étiquette Chamvermeil. Une saga résumée dans un petit livre d’entretien qui vient de sortir,  « Autour d’une bouteille ».(1) Sa lecture éclaire sur la finesse de l’homme et du viticulteur, son bon sens, mais aussi le goût de l’entreprise et sa ténacité.


1.  Autour d’une bouteille, Philippe Raoux, La Winery, éd. Elytis entretien avec Gilles Berdin.

Partagez l'article !
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
On en parle !
À lire ! SOCIÉTÉ > Nos derniers articles