La Gironde et l’Adrar : un bel exemple de coopération franco-algérienne


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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 04/06/2008 PAR Joël AUBERT

@qui! : Vous rentrez d’un voyage en Algérie organisé dans le cadre de la coopération décentralisée. Que vous ont appris vos contacts et rencontres à propos de la situation actuelle du pays?

Philipe Madrelle : D’abord, je tiens à souligner que les autorités et responsables rencontrés nous ont témoigné plus que la naturelle hospitalité des gens du sud, trop souvent passée, ici, sous silence. Les audiences accordées par les Ministre de la Culture (notre photo avec Philippe Madrelle) et des Collectivités locales représentaient, certes, un véritable honneur pour notre département et les actions concrètes menées au bénéfice de nos deux populations; elles ont vite dépassé le volet purement protocolaire pour atteindre une vraie profondeur. Nos échanges et conversations furent la preuve de la grande confiance qui caractérise nos rapports, depuis bientôt trois ans.
Ce qui nous a frappé ? Une vraie volonté de l’Etat algérien de redistribuer, sans attendre, les profits tirés de l’exploitation du pétrole et du gaz. Partout on construit… logements, routes, infrastructures, une Université africaine dont les aménagements peuvent faire rêver… Un réel souci de qualité pour les équipements et bâtiments, respectueux des techniques et de l’esthétique traditionnelle.
Manifeste aussi, ce souci d’ouverture et d’échanges, et là, reconnaissons que les Français, plus que leurs collègues européens demeurent encore bien frileux !!! Bien sûr, après les années noires de la décennie passée, tout ne peut aller aussi vite dans les esprits et il faut composer pour adapter les mentalités à ces immenses changements dans un Sud en pleine transformation.
Nous avons pu constater aussi que « l’après-pétrole » fait déjà partie des préoccupations des dirigeants, conscients que le soleil et les vents représentent ici des énergies renouvelables capitales… Nous avons vite compris que la Gironde, pilote en matière d’Agenda 21, et les autorités nationales et locales algériennes « avions des choses à nous dire » autour d’options communes en matière de développement raisonnable, équitable et durable !

Aider à la sauvegarde des manuscrits du désert

@! : Existe-t-il vraiment une attente au sein des collectivités territoriales algériennes?

P.M. : Oui, sans équivoque. Et cette attente n’est pas « une question d’argent » ; elle est liée à cette volonté d’ouverture économique, certes, mais surtout de demande d’échanges de savoir et d’expériences, de formations professionnelles, de dispositifs d’insertion…. C’est ainsi que le Ministère de la Culture et le Centre National des Manuscrits d’Adrar, créé pour sauvegarder les manuscrits du désert, ont fait appel au Conseil général pour l’accompagner dans ce programme à court et long terme; c’est ainsi que l’Université d’Adrar va envoyer en novembre prochain sept doctorants, en Gironde, dans le cadre d’une convention avec le Conseil Général et l’IUFM, l’Institut de Formation des Maîtres, pour soutenir la maîtrise du français « technique » des étudiants et chercheurs. Et comme nos échanges sont basés sur la réciprocité, une dizaine de professeurs stagiaires de l’IUFM se rendront au printemps 2009 à Adrar. Savoir-faire, encore, avec une demande de l’Ecole des Jeunes malentendants d’Adrar, disposant d’un équipement et de professionnels performants mais qui nous demandent une expertise-conseil en matière d’insertion.
Dans le cadre d’une valorisation touristique raisonnable de leur patrimoine historique naturel, immatériel et humain dans le Touat, à Timimoun ou de le Gourara, les autorités sont curieuses des dispositifs du tourisme de proximité que nous avons mis en place en Gironde. La Route des bastides pourrait bien un jour « se jumeler » avec la route des Ksours…

La délégation du conseil Général de la Gironde dans la région de l'Adrar

La jeunesse d’abord

@! : Quelle place comptez-vous réserver à ce type de coopération et quel intérêt pour un département comme la Gironde?

P.M. : Quel intérêt pour le département de la Gironde ? C’est la première question qui fut posée par la presse algérienne à Adrar au sénateur Bernard Dussaut venu signer au nom du Conseil Général, accompagné du 2ème Vice-Président Jean Touzeau, le protocole d’accord en novembre 2005 !
Eh bien, nous savons, de plus en plus, et les indicateurs climatiques nous le montrent chaque jour, que nous sommes tous irrémédiablement solidaires de la qualité de notre planète. Nous avons terriblement à apprendre des techniques, usages et ressources des territoires qui nous sont devenus de plus en plus proches. L’eau se fait rare et le système d’irrigation des « foggaras » à Tamentit nous intéresse ! L’agriculture d’oasis sait gérer un bien précieux que nous dilapidons encore trop par des cultures trop « gourmandes ». Nos territoires du Nord, villes, départements, régions, ne peuvent plus, aujourd’hui, vivre en vases clos à l’heure où les techniques tissent des liens virtuels. La peur de l’Autre et du différent est bien mauvaise conseillère et nos identités évoluent au contact d’autres modes de pensée, de coutumes et d’usages. C’est pourquoi, la coopération entre et pour les populations d’Adrar et de Gironde est d’abord tournée résolument vers la jeunesse.(1) D’ailleurs, nous allons poursuivre et accentuer tout ce qui, autour de projets éducatifs, pédagogiques, professionnels et culturels, favorisera la circulation des idées et des personnes.
Repensons à cette « semaine culturelle d’Adrar » dans six villes de Gironde en septembre 2007: plus de 80 musiciens, conférenciers, artistes, cuisiniers ont rencontré plusieurs centaines de Girondins, de citoyens franco-maghrébinsqui bientôt ont demandé : « Et après ? » Alors, dès aujourd’hui, nous développons avec les autorités locales et nationales algériennes, avec nos associations, cet « après » : ainsi, quatre collèges à Bordeaux, Mérignac, Lormont, Pessac échangent déjà avec les collèges d’Adrar, de Timimoun, de Tinerkouk, sur leur environnement, leur vie quotidienne, leurs préoccupations d’adolescents… Les premiers départs ont déjà eu lieu et la Gironde prépare déjà l’accueil de deux classes l’an prochain…

Propos recueillis par Joël Aubert

1.les élèves du collège Edouard Vaillant se sont rendus à Timimoun en novembre 2007; les élèves du collège Montaigne de Lormont doivent se rendre en Adrar en novembre 2008, des projets sont en cours d’études avec les collèges de Mérignac-Capeyron et Alouette de Pessac.

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