Les Boussoles du numérique : inverser les classes pour retrouver le nord ?


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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 14/10/2015 PAR Solène MÉRIC

Ce 14 octobre, les Boussoles du numérique a accueilli en son sein, le lancement du « Plan exceptionnel de formation au numérique » par la Direction du numérique pour l’éducation et la Direction générale de l’enseignement scolaire. Un événement dans l’évènement, en total cohérence avec les journées organisées par l’an@é (Association Nationale des Acteurs de l’Ecole). En effet, centré sur les transformations pédagogiques et organisationnelles liées aux usages du numérique, ce plan a pour but de « contribuer au développement d’une réflexion globale sur l’Ecole de demain et montrer comment le numérique sert les objectifs des réformes en cours ».
Dans ce cadre, le focus a notamment été fait sur le dispositif de la « classe inversée », exemple de pédagogie active grandement facilitée par l’outil numérique. En effet, le principe de base du dispositif est d’intervertir le temps des devoirs et le temps des leçons. En pratique, les élèves reçoivent chez eux, des cours préparés par le professeur sous forme de ressources en ligne (en général des vidéos), baptisées « capsules » qu’ils doivent regarder le soir, permettant ainsi de libérer du temps de classe. Ce temps étant alors davantage consacré à des temps d’activité et de travail de groupe, le plus souvent sur des outils numériques (tablette ou ordinateur), afin d’approfondir de manière pratiques les connaissances des élèves. Mais ceux qui en parlent le mieux ce sont encore, les professeurs « inversés », eux-mêmes.

« Apprendre « dans » et « hors » la classe »Dans la bouche de Marie Soulié, professeur de français dans l’Académie de Bordeaux, « les élèves travaillent en îlots, en groupes de travail. Je ne suis plus face à face avec eux, mais côte à côte; mon rôle en classe est désormais d’accompagner, de guider mes élèves dans leur propre apprentissage. Quand j’ai décidé d’enseigner de cette manière, j’ai réellement eu la sensation d’être utile dans mon métier, pour la première fois !» s’enthousiasme-t-elle.
Pour Maxime Treiber, professeur de SVT en lycée, un des avantages de la classe inversée, c’est la possibilité d’apprendre « dans » et « hors » la classe. « Les ressources numériques sont à disposition de l’élève quelques jours ou semaines, avant le traitement du sujet en classe. Donc l’élève peut y aller à son propre rythme, il regarde la capsule quand il veut et a également la possibilité d’y revenir. D’autant qu’après la classe, il pourra aussi retrouver des ressources complémentaires, ou le résultat des projets réalisés en groupe dans la classe ». Car la production de ressources, et même de certaines capsules peuvent être produites par les élèves ou un groupes d’élèves volontaires, souligne pour sa part Amélie Mariottat, professeur de français à Bergerac.
Pour autant, si les exemples pris ici provoquent selon les professeurs un réel enthousiasme de la part « des élèves qui reprennent plaisir à apprendre », mais aussi une bonne acceptation des parents, « qu’il faut absolument informer et associer à la démarche, autant que le chef d’établissement », c’est pour les professeurs une toute autre méthode pédagogique à mettre en œuvre, qui n’est pas, « surtout l’année 0 » des plus faciles, et « fait peur à un grand nombre d’enseignants », avoue Olivier Quinet Professeur à Montpon-Monestérol.

Présentation d'expériences ''classes inversées


Le travail entre pairsEt pour cause, Soledad Messiaen, enseignante de CM1 et CM2 de l’académie de Poitiers, évoque tout un panel de compétences que doit parvenir à développer l’enseignant qui fait le pas de la classe inversée. Pour elle, ça a d’abord été « la prise de conscience » que pour mieux prendre en compte la diversité des élèves d’une même classe, « il fallait s’adapter, créer un nouveau système, être dans le changement permanent pour s’accorder au mieux au élèves. Autre compétence, la confiance déportée sur l’élève, en lui rendant pleinement sa tâche d’élève : apprendre ; et à moi de créer l’environnement dans la classe pour qu’il parvienne. » Autre compétence presque évidents, mais des plus simples : « développer les compétences numériques nécessaires », pour créer des capsules, jusqu’à, en ce qui la concerne, créer son propre site de ressources pour ses élèves. Le tout beaucoup par l’auto-formation pour cette enseignante qui n’était « pas geek du tout !»… Enfin, un point relevé par tous, comme le cœur de la classe inversée : « l’enseignement déporté » ou le travail entre pairs. Les élèves travaillent ensemble, collaborent, se lèvent, échangent d’un groupe à l’autre, se déplacent pour chercher des informations, certains élèves répondent et expliquent à d’autres. Un dernier constat effectué par chacun des enseignants, qui notent d’ailleurs que c’est une bonne chose « autant pour celui qui interroge que pour celui qui explique, ça l’oblige à prendre de la distance ou reformuler une idée… ». Enfin, dernier aspect souligné par Soledad Messiaen : « la diffusion et le partage avec d’autres enseignants ». Chacun pouvant utiliser les ressources créées par d’autres tout en y apportant leur regard ou suggestions si besoin.

Les bons élèves apparaissent moins bons…Au total une nouvelle approche pédagogique, dont ces enseignants sont ravis. Mais qu’en est-il des élèves ? La classe inversée apparaît être favorable voire très favorable aux élèves moyens et en difficulté. Ces derniers sont « remotivés à l’apprentissage », dans un cadre qui permet outre l’attrait du numérique, « une plus grande personnalisation de l’enseignement à travers, par exemple, des scénarios pédagogiques adaptées par groupe d’élèves ». Mais les bons élèves, quant à eux bien adaptés au système « classique », apparaissent souvent moins bons qu’ils ne le seraient dans le modèle du cours magistral… Mais selon Héloïse Dufour, présidente de l’association « Inversons la classe », « il n’y a pas de fatalité, il faut trouver les bonnes stratégies pour faire adhérer les bons élèves à ce nouveau mode de fonctionnement. Dès lors que l’expérience de la classe inversée les prend correctement en compte, « ils  »explosent » de façon impressionnante », assure-t-elle.
Au total, si dans la classe inversée le numérique est l’outil indispensable à sa mise en route effective, il n’en reste bien que l’outil. « Ce qui compte c’est l’enseignant avec sa volonté d’innover ; ce qui compte c’est la démarche de pédagogie active qui est mise en œuvre », synthétise Vincent Faillet, professeur de SVT, avant de conclure habilement en un clin d’oeil au champ lexical de la journée : « la boussole aide le navigateur mais c’est le capitaine, qui permet d’arriver à bon port ».

Pour l’heure les discussions au long cours et les ateliers plus concrets des Boussoles du numérique sur les outils, ressources et pratiques, se poursuivent jusqu’à ce jeudi après-midi.
Voir le programme : boussolesnumeriques.jimdo.com/programme/jeudi-15-octobre/

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