Logement social : le « croquignolesque » de la situation « ne fait pas rire du tout » la Présidente de l’Union régionale HLM


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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 18/10/2017 PAR Solène MÉRIC

« Il y a un fossé extrêmement important entre ce que ressentent les professionnels et les échos que nous avons du Gouvernement. Et l’intervention télévisuelle d’Emmanuel Macron en a été le dernier point d’orgue », pointe Muriel Boulmier, Présidente de l’AROSHA (Association régionale des organismes HLM d’Aquitaine) et de l’Union Régionale Nouvelle-Aquitaine qui fédère 66 organismes HLM sur la région.

 » Ce n’est pas une réforme, c’est une mesure budgétaire « 
Un fossé déjà existant dès la campagne présidentielle rappelle-t-elle : « Le candidat Macron, était le seul qui n’avait pas une ligne sur le logement dans son programme ». Un intérêt pour la question confirmé lors de la mise en place du Gouvernement du nouveau Président : « Il n’y a pour le logement ni Ministère ni même un secrétaire d’Etat… », glisse t-elle. Cela dit au regard de l’enveloppe de 41Mds d’euros que représente pour autant la politique du logement, « il est normal qu’un Président de la République, dans le cadre d’un déficit budgétaire préoccupant s’y intéresse. Mais sur ces 41Mds €, 18 Mds sont des APL. Et sur cela seulement 8 Mds sont perçus par les locataires des bailleurs sociaux. Je ne suis pas hostile à une réforme sur une approche globale mais là, ce n’est pas une réforme, c’est une mesure budgétaire dont les conséquences ont été particulièrement mal mesurées. Une réforme ce serait sortir du zoom des logements sociaux. » Et de rappeler, face à l’argument inflationniste de loyers qui seraient corrélés aux APL, qu’en ce qui concerne les HLM, contrairement au parc privé, « les loyers et les augmentations de loyers sont réglementés… Ils sont donc évidemment contenus par le législateur et ne peuvent pas avoir de caractère inflationniste. »

Au-delà de ce « fossé » initial, entre le Président et les organismes HLM, « Ce dimanche, nous avons été meurtris d’entendre le Président de la République qualifier la situation du logement social de « croquignolesque ». Pour moi ce qui est croquignolesque, c’est de vouloir faire porter au logement social le déficit budgétaire. Ca ne me fait pas rire du tout que ce soit les plus fragiles qui en fassent les frais. »

En région, une perte de 110 M euros par an pour les organismes HLM
Car selon elle, ce sont bien les locataires des HLM (près de 600 000 en Nouvelle-Aqutaine, dont les 2/3 en dessous du seuil de pauvreté) qui seront les premières victimes de la décision de baisser les loyers proportionnellement à la baisse des APL. En Nouvelle-Aquitaine, la mise en œuvre de ce projet engendrera un appauvrissement des fonds propres des organismes HLM de 110 M€ par an, soit 10 à 15 % des loyers perçus, soit peu ou proue, l’équivalent de la capacité à investir des organismes HLM en construction ou en réhabilitation, une fois sortie le remboursement de la dette, l’entretien ou encore l’accompagnement social des locataires.
« Or, l’objet premier de nos réhabilitations est l’efficacité énergétique, qui peut permettre d’aller jusqu’à diviser par trois la consommation énergétique des foyers, soit l’équivalent sur une année d’un mois de loyer pour nos habitants ». C’est globalement aussi la qualité du service de proximité rendu par les organismes dans les quartiers, qui pourraient se voir impactée. « Dans le logement social on est loin du système de rente qui ne servirait pas le quotidien des habitants. Le diagnostic de cette réforme est véritablement erroné »

« L’impact portera aussi sur les filières économiques et les PME locales »
D’un autre point de vue, l’Union Régionale HLM Nouvelle-Aquitaine rappelle que « le logement HLM représente 12% de l’activité totale de la construction en France. En la matière la Nouvelle-Aquitaine est une des régions les plus dynamiques avec +5% de nouveaux logements programmés chaque année. « La réforme risque de briser le fameux « choc de l’offre ». en 10 ans nous sommes passés de 3000 à 5000 logements produits par an en Gironde. En 2016 : 10 000 logements sont en projets de construction nouvelle pour la Nouvelle-Aquitaine, ça concerne entre 20 000 et 30 000 personnes logées. Avec ces mesures budgétaires nous risquons un retour en arrière ». Et jusqu’à 20 000 emplois directement ou indirectement menacés.
Car, « l’impact portera aussi sur les filières économiques et les PME locales par lesquelles nos passons tant pour les réhabilitations que pour l’investissement dans du neuf. » Et quand il ne construit pas directement, le logement social achète. « Sur Bordeaux Métropole, nous acquérons 1 logement sur 3 en VEFA (Vente en l’Etat Futur d’Achèvement) auprès des promoteurs privés… C’est donc bien nous qui souvent permettons de donner un équilibre financier à ces programmes. Et par ailleurs, ce que nous n’investirons pas ce sera autant d’impôts et de taxes, qui ne retomberont pas dans les caisses de l’Etat ou des collectivités. Je pense notamment à la TVA… Ce sont donc peut-être des économies à effet immédiat, mais pour des ressources diminuées à termes ! », pointe-t-elle.

La mobilisation des élus locaux
En Nouvelle-Aquitaine, c’est 1 Md d’euros par an qui est consacré à la construction de logements sociaux neufs…. un poids économique non négligeable dont les élus locaux ont bien conscience, qui est par ailleurs porté « par l’effet levier des investissements en fonds propres des organismes HLM », souligne la présidente régionale.
C’est d’ailleurs sur la mobilisation de ces derniers que Muriel Boulmier veut croire, car nous nous n’arrivons pas à établir un véritable dialogue, regrette-elle. Parmi eux, elle fonde son espoir notamment sur Alain Juppé qui est le premier à avoir réagit aux annonces du gouvernement pour les dénoncer. L’enclenchement du dialogue se fera peut-être ce vendredi, lors d’une visite d’Edouard Philippe d’un chantier immobilier situé sur l’ancien site de Santé navale à Bordeaux… et qui compte justement 25% de logement social.

L’occasion aussi de faire part au Premier ministre d’une autre de ses craintes : « Si la réforme passe, cela veut dire que toutes les productions nouvelles seraient strictement fléchées par les obligations de la loi SRU (qui fixe un taux de mixité sociale minimum dans les villes), excluant d’autant tous les territoires ruraux, qui ont pourtant aussi besoin de logement sociaux… », de quoi une fois de plus fâchée celle qui est aussi la Directrice générale de Ciliopée, Organisme HLM en Lot-et-Garonne.

Sur le territoire les manifestations et mobilisations d’acteurs et partenaires locaux du logement social se multiplient: lire notre article concernant la Charente-Maritime.

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