Solidarité et masques en tissu : nouveau combat dans des communes en Gironde


Chloé Chancelier
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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 31/03/2020 PAR Lucile Bonnin

Chloé Chancelier est ostéopathe à Gauriac depuis 6 ans. Depuis la déclaration de mise en confinement, les ostéopathes n’exercent plus leur profession. Plutôt qu’occuper ses journées devant Netflix, la thérapeute a voulu se rendre utile. L’aventure commence, le dimanche 17 mars, par un petit post personnel sur le réseau social Facebook qui s’adressait uniquement à ses amies. « Cela a pris très vite de l’ampleur, explique Chloé Chancelier. Mon post a été partagé plus de 400 fois. » Elle a, alors, vite décidé de créer un groupe, sur Facebook, qui a connu un franc succès. France Gracia, une amie de Chloé, lui est très vite venue en aide et a notamment pris en main les réseaux sociaux. Les demandes ont pu être par conséquent mieux cadrées et 4 autres groupes ont été créés en plus de celui d’origine connu sous le nom de « Couturièr.e.s Covid du 33710 ».

France Gracia, en congé maternité actuellement, s’est impliquée dans le projet, initié par Chloé Chancelier, à 100% afin d’optimiser cette production artisanale. « J’ai aidé Chloé à structurer l’initiative, explique France Gracia. On s’est très vite rendu compte que la Haute-Gironde était un territoire trop étendu pour que cela soit gérable au niveau logistique. Il fallait réussir à rester local pour pouvoir à la fois faire du ramassage lorsque les masques sont prêts et fournir du matériel aux couturières bénévoles, tout en respectant les règles de confinement évidemment. » 

« L’humain est bon par nature »

Dans les situations critiques, beaucoup de citoyens révèlent leurs vraies natures. L’urgence et l’inquiétude poussent à adopter divers comportements. Chloé Chancelier, elle, croit fermement que « l’humain est bon par nature ». Son engagement est donc à la hauteur de ses certitudes. Elle a même été jusqu’à se lancer dans des vidéos « tutos ». D’abord, elle a expliqué aux membres du groupe comment faire pour créer, eux-mêmes, un groupe Facebook avec leur code postal. On voit ainsi naître des groupes comme « Couturièr.e.s Covid du 33390 », « Couturièr(e)s Covid 33920 », et bien d’autres. Puis, elle s’est lancée dans le tuto pour la confection de masques. « J’ai simplement regardé des tutoriels sur Youtube dès le début du confinement, indique t-elle. J’ai aussi vu que le CHU de Grenoble avait décrit les étapes pour faire son propre masque en tissu. Mais j’ai vite réalisé un tutoriel moi-même, car il y avait beaucoup de questions redondantes concernant les étapes pour coudre correctement. »

Plus de 500 membres sont sur le groupe initial des couturières. On y retrouve des bénévoles mais également des personnels soignants ou des particuliers en besoin de masques. Cette plateforme d’échange permet avant tout d’organiser la solidarité à l’échelle locale. Appartenir au secteur médical à aidé Chloé Chancelier pour ouvrir les yeux sur la situation de crise que peuvent connaître actuellement les soignants avec la pénurie de masques. Les commerçants aussi manifestent leur détresse chaque jour. La responsable du groupe des couturières a pu notamment échanger avec Clémence Le Bras, commerçante chez Mybioshop Cavignac. « Clémence a été très importante dans ce projet solidaire, confie Chloé. Elle a pu diffuser dans le haut de notre territoire l’information et ramener de nouveaux bénévoles. C’est quelqu’un qui a été dans le besoin et qui a développé une vraie dynamique. »

De manière pragmatique, le principe est simple : deux annonces par jour sont diffusées sur le groupe. Une s’adresse aux couturières (concernant leurs besoins et leurs matériels) et une aux professionnels qui ont un besoin de masques et qui sont exposés chaque jour au public. « Nous avons beaucoup donné de produits aux aides-soignantes, à des EHPAD ou encore aux drives de supermarchés (Leclerc et Carrefour) » explique France Gracia. Les pompes funèbres sont aussi une des entreprises que le groupe solidaire souhaite aider. Ces masques serviraient notamment aux familles qui viennent voir les cercueils et au personnel. « Les couturières préparent actuellement une centaine de masques pour qu’ils puissent protéger les gens qui viennent voir leurs défunts » précise Chloé Chancelier.

Un artisanat bien ficelé : de la production à la distribution

masques

L’objectif du masque n’est pas de protéger lorsque l’on est en contact des malades. Ces masques artisanaux protègent le visage des postillons et évitent de mettre la main à la bouche : c’est une façon de s’auto protéger de nos gestes inconscients. Pour Chloé, la pénurie nécessite que l’on agisse à son niveau : « certaines infirmières sont dans l’obligation de garder leur masque toute une journée car elles n’en n’ont que deux pour toute la semaine. L’une d’elles m’a confiée récemment qu’elle plaçait son masque chirurgical entre deux torchons, et qu’elle passait le fer à repasser pour enfin le remettre. Ces gens sont mal équipés mais ne sont pas prioritaires. On ne remplace pas le FFP2 mais ces masques en tissu, s’ils sont changés toutes les deux heures et lavés à haute température, fonctionnent. Nous faisons minimum des lots de 8 par personne. »

Pour la distribution des masques, Chloé Chancelier se sert du réseau des pharmaciens. Quand le masque est produit, France et Chloé demandent à la personne qui l’a cousu de le laver, de le faire sécher et de le repasser. Puis, le masque est conditionné dans un sac de type ziploc. Une tournée des couturières est alors faite, la marchandise est récupérée et ensuite les masques sont amenés à la pharmacie. Soit la personne vient chercher sa commande en pharmacie soit Chloé Chancelier le livre directement au destinataire en respectant les consignes de sécurité.

« Aujourd’hui, c’est mieux que rien, affirme France Gracia. C’est, certes, une protection qui n’est pas adaptée pour le contact des gens contaminés, mais pour les autres cela reste une bonne protection. » Chloé Chancelier associe cette démarche solidaire avec son intérêt personnel pour le zéro déchet. « Dès le début, les stocks que je voyais qui allaient être jetés me faisaient mal au cœur, confie-t-elle. C’était aussi très difficile pour moi de voir des patients, des collègues ou des amis qui étaient dans la difficulté. » Le projet est né ainsi, faisant appel au temps libre et à la bonne volonté de chacun pour aider ceux et celles qui en ont le plus besoin. Cet élan du cœur est la preuve que rien n’est inutile, et que, faire les choses à son niveau, peut apporter beaucoup d’un point de vue social. 

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