Renaud Jean, Vice-président du collectif des viticulteurs de Gironde : « il faut repenser l’organisation »


Aqui.fr
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 20/09/2010 PAR Solène MÉRIC

« Bordeaux n’en est pas à sa première crise, mais jusque là, elles étaient conjoncturelles, et le plus souvent on réglait ça par une réduction de l’offre pour relancer l’affaire. Mais cette fois, ça fait dix ans que ça dure… ce n’est pas une crise comme les autres, c’est une crise de Bordeaux, une crise structurelle ! » Face à cela, Renaud Jean ne voit qu’une solution : « une réforme structurelle du marché, une nouvelle organisation de la filière. »

Les producteurs, la variable d’ajustement du prix
Selon lui, « Bordeaux a longtemps vécu sur la croissance du marché, puis du jour au lendemain, on a découvert la concurrence et on s’est retrouvé avec une corporation qui ne sait pas vendre son vin. Conséquence : les producteurs sont devenus la variable d’ajustement du prix, soit par la réduction du volume, soit en créant de nouvelles règles et critères techniques, pour jouer sur la qualité. ». Mais le constat est là : « à chaque fois qu’on réduit la production, on réduit les prix et, sur un marché mondial qui augmente pourtant de 6% par an, on laisse notre place aux autres ! » En bref, réduction de l’offre rime avec monopole, ce qui n’est plus le cas de Bordeaux. Renaud Jean en est persuadé, « la baisse du prix du vrac, c’est un problème d’organisation, pas de volume ni de qualité du produit. » Dans cette optique, il souligne que le Plan Bordeaux du CIVB, qui propose une segmentation de l’offre, « a un coté très positif puisqu’enfin une stratégie est mise en place ». Mais, revers de la médaille, « cette stratégie n’est pas opérationnelle » car pas chiffrée, et, ce plan marque aussi « la volonté d’éliminer plus de 350 000 hectolitres, soit l’équivalent de 7000 hectares ! ».

Pallier l’urgence de ceux qui vont s’arrêter
Du point de vue de la filière, Renaud Jean déplore que « les producteurs soient complètement déconnectés du marché ». D’après lui, « le vrac à 700 €, ce n’est pas la réalité dans le sens où le marché ne demande pas ça. 60% de la commercialisation du vin passe par le négoce, par conséquent la production n’a pas la main et va toujours au moins disant sur les prix pour garantir les volumes ». En pratiquant de tels prix, « on flingue la viticulture !». Pourtant, il s’empresse de préciser « qu’humainement, on ne peut pas en vouloir aux viticulteurs isolés qui accumulent les dettes et les visites d’huissiers, de vendre à 700 euros le tonneau. Pour eux, il faut trouver les moyens de pallier à l’urgence. » Et sur cette question, Renaud Jean critique sévèrement l’interprofession qui, dans son plan Bordeaux « ne gère pas l’urgence des mecs qui vont arrêter. »
 
« Il faut changer les habitudes »
Alors, quand on le questionne sur le profil idéal d’une nouvelle organisation, il insiste sur la nécessité pour les producteurs « de s’impliquer davantage dans la filière pour comprendre comment ça fonctionne. On est responsable de ce climat là parce qu’on s’est laissé porter par d’autres, sans vraiment chercher à savoir plus loin. Maintenant, il faut changer nos habitudes. L’interprofession avec son système dual production-négoce est forcément dans l’affrontement. Il faut réinventer un système avec des objectifs, des stratégies et des intermédiaires opérationnels. » S’il a bien quelques idées sur une modification de fond du CIVB, l’implication des viticulteurs, il la pratique déjà avec le GIP des Vins d’Aquitaine créé, avec d’autres, en d’avril 2010. Objectif : permettre aux viticulteurs membres, « de prendre conscience de leur environnement et de les rendre plus autonomes sur les circuits de distribution », grâce notamment à la mise en place d’un réseau et de réflexions communes. Une initiative au succès certain puisque cet été les producteurs du Groupement d’intérêt économique ont vendu le tonneau de Bordeaux à 950 € et le tonneau de Bordeaux Supérieur à 1200 €.

Solène Méric


Partagez l'article !
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
On en parle ! Gironde
À lire ! SPÉCIAL > Nos derniers articles