La franche camaraderie des Amis du Vieux Lormont


Alix Fourcade
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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 20/04/2018 PAR Alix Fourcade

Autour d’une table en formica orange, dans une salle sombre où une vieille horloge Japy dans le même matériau compte les heures et où quelques vieilles photos délavées colorent le papier peint des murs, trois Amis du Vieux Lormont, Alain Lafon, Gérard Gsell, et Igor Pavlata, l’actuel président, nous ont reçu vendredi 20 mai pour parler de leur association. Celle qui fête aujourd’hui ses cinquante ans, qui a vu évoluer la ville, et que les trois compères connaissent sur le bout des doigts.

« Je vous laisse, il faut que j’aille recoller une carte qui se fait la malle dans un cadre ». Au musée des Amis du Vieux Lormont, local de l’ancienne mairie qui leur a été cédé en 1973, chacun met la main à la pâte pour que les collections présentent bien. Des anciens pistolets de la Seconde guerre mondiale, des « graffitis » médiévaux retrouvés dans les geôles du château de Lormont, ou encore un scaphandre de plongée récupéré sur les chantiers navals, les effets du musée sont variés. « Au lieu de jeter leurs souvenirs, certains Lormontais préfèrent parfois venir nous les déposer », explique Gérard, comme ces poupées qui datent de la Première guerre mondiale et qu’une femme a retrouvé dans son grenier.

Scaphandre

Ancien cadre chez Ford à Blanquefort, Gérard Gsell, 74 ans, a été dans les premiers à adhérer à l’association en 1975. « J’ai vu arriver les premières machines dans l’usine, et les dernières partir à la décharge », se désole le grand homme aux cheveux blancs. Féru d’archéologie depuis son plus jeune âge, il a fait la connaissance des Amis grâce à un article de journal retraçant la progression des fouilles dans le Parc de l’Ermitage : point de départ de la fondation de l’association. Là où se tenait avant une carrière de pierres a, en effet, été mis au jour une nécropole gallo-romaine, du 3e-4e siècle. Avec l’aide de la direction régionale des affaires culturelles (DRAC), les bénévoles ont aussi découvert une série de poteries datant du 13e siècle, un peu plus loin, au Grand Tressan.

Les découvertes au fil des constructions 

L’année 1968 ne doit rien au hasard, dans ces découvertes. Les zones à urbaniser en priorité (ZUP) commencent à se construire à cette époque, remuant les vestiges endormis des terres lormontaises. « Mais, cela ne s’arrête pas là, puisque les constructions actuelles ont aussi permis de trouver de nouvelles traces du passé sur le site de l’EPHAD, ou près du garage Audi », renchérit le président de l’association, Igor Pavlata, 72 ans, reconnaissable par ses lunettes de vue dorées Aviator.

L’ancien bourg comptait 4.000 habitants dans les années 60 et s’arrêtait au niveau de la médiathèque; Lormont en dénombre aujourd’hui 23.000. « En 1962, les rapatriés d’Algérie se sont installés à Carriet ; puis les Turcs, embauchés par l’usine Ford, sont arrivés sur le plateau dans les années 70, avec les anciens résidents de Mériadeck, dans Bordeaux centre, quand le quartier a été rasé par Jacques Chaban-Delmas », raconte le président visiblement passionné par l’histoire de la métropole bordelaise. C’est en partie grâce à son association que le lavoir Blanchereau, situé sur la commune, a été sélectionné par le « loto du patrimoine » de Stéphane Bern cette année. Il s’agit du seul monument de Gironde qui va bénéficier de ce financement pour sa restauration.

Les trésors du château de Lormont

« Je suis le dinosaure de la maison », s’amuse Alain Lafon, qui a vu l’association se créer, tandis qu’il travaillait dans les composants électroniques pour Siemens, « dont l’usine est aujourd’hui délocalisée… en Allemagne », précise-t-il. Né à Lormont, il était le petit jeune parmi les fondateurs, Henri Souque et François Berthou, qui ont suivi de près les fouilles de l’ancienne carrière. Ensuite, les Amis ont récupéré des biens dans l’ancienne église de la ville, dont une toile a même été restaurée par des élèves du secondaire. 

Les Amis du Vieux Lormont

Le château de Lormont est aussi un lieu privilégié, historiquement. « Quand Bordeaux était anglaise, le fils du roi venait y séjourner ; certains disent même qu’il s’y est reproduit », ne peut s’empêcher de remarquer Monsieur Pavlata, avec un petit sourire narquois. Avant de revenir au sérieux, « c’est aussi là que s’est négociée la fin de la guerre de Cent Ans », au 15e siècle.

« On aime toujours se trouver des racines »

Pour séduire les jeunes, visiblement non-majoritaires parmi les Amis du Vieux Lormont, l’association n’a pas dit son dernier mot. Elle organise régulièrement des visites guidées du musée avec les scolaires. Et pour ses cinquante ans, l’exposition à la médiathèque du Bois Fleuri est un lieu stratégique : c’est là que la plupart des adolescents de la ville se rendent pour lire et avoir accès aux ordinateurs.

L’histoire de Lormont continue aussi, par ailleurs, à susciter l’intérêt des habitants : « les personnes qui s’installent dans la vieille ville viennent souvent nous demander l’origine de leur maison », avance Monsieur Pavlata, « on aime toujours se trouver des racines ». Pour leur répondre, les Amis du Vieux Lormont les attendent au musée, en discutant autour de leur table en formica.

Les Amis du Vieux Lormont

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